lundi 1 novembre 2021

La même langue


Cœur où se façonne
Le même sentiment écarlate
Fleuve
Vermeil et tumultueux accord
L'ardence subtile qui habite
Et règne
Infuse, l’assemblée de gènes
Quand le corps ouvre la bouche
Œuvre une seule langue...

Inexplicable et doux prodige !

Sentinelle
Apaise hardiesse, nul tourment, 
Il aurait fallu un désir de gloire
Pour devenir tour de Babel


Christina Goh

mercredi 22 septembre 2021

Message de l'Enjoué, Aimable dit Le Beau


- Ami !
Oh Ami...
Pourquoi mentir ?
Je l'ai vu dans tes yeux
C'était hier, avant de mourir
De ton regard, un peu...
Je retiens vos luttes encore
Et vos voix, âpres, qui prient
Mais même de loin, le sort
S'est délié quand on a ri.
C'est moi l'intrinsèque,
L'Enjoué, Aimable, le Beau,
Loin du dard, du bec
De l'amer, et même dudit faux
Je les sers tous, mais, toi... 
Ne cesse d'y croire, Ami, oh pitié
Forces éprouvées mais joyeuse foi
En grâces, du geste la Beauté
Coule déjà, miel en ton cœur
Remède doux, ultime, colmate
Tout. Ami, libère tout spectre, Peur
Recueillait juste, tel le stigmate,
L'attente, pollen des extases...
En vie.
Ami ?

- Ami !


Christina Goh


mercredi 11 août 2021

Le pays de Césaire et les voix


Les nouvelles concernant la Martinique, île maternelle sur laquelle j’ai vécu et dont la situation sanitaire est une des plus critiques en France depuis le début de la pandémie… Comment ne pas pleurer pour ceux qui sont une partie de soi ?

Pensant aux proches des décédés, aux salles ou tentes de réanimation où en ce moment même certains luttent pour sauver certains ou pour se sauver eux-mêmes, sans cynisme aucun. Je me suis rappelé de « Partir… » de Césaire. Poète martiniquais.

« Et venant je me dirais à moi-même :
« Et surtout mon corps aussi bien que mon âme, gardez-vous de vous croiser les bras en l’attitude stérile du spectateur, car la vie n’est pas un spectacle, car une mer de douleurs n’est pas un proscenium, car un homme qui crie n’est pas un ours qui danse…
»

Je dirais feuille. Je dirais arbre. Je serais mouillé de toutes les pluies,
humecté de toutes les rosées... 

Et si je ne sais que parler, c’est pour vous que je parlerai »

Ainsi parla Césaire.

Dans ma tête a résonné doucement : est-ce que je connais aujourd’hui personnellement quelqu’un qui n’a pas de voix ? Et je me suis rappelé de celle que j’ai eu au téléphone, atteinte de Covid-19, clouée au lit, qui pensait que cela allait passer, qui m’a dit entre deux toux : « je ne pouvais pas t’appeler, pas me lever, couchée, je ne pouvais même plus parler ». Plus de voix. Elle avait peur que son mari soit contaminé car déjà immuno-déprimé. Je me suis rappelé de ma meilleure amie en chambre stérile en ce moment, orpheline depuis que son père est mort après avoir contracté la Covid-19, de tous ceux et toutes celles qui sont si discrets, parfois malgré eux. 

Dans l’incertitude d’une pandémie, au siècle des nouvelles technologies, que puis-je faire me suis-je dit ? Je n’ai aucune qualification médicale. Mais je refuse d’être une spectatrice.

Respecter les gestes barrières, me vacciner. Certains y ont travaillé toute une vie et s’accordent encore à le dire. Une piste ? 
Sinon j’attends ? Comme disent certains : "je me préserve, déjà pour ma vie, des gens meurent, mais depuis la nuit des temps c'est ainsi. Suis-je le gardien de mon frère et n’est-ce pas la loi de la nature, les plus fragiles doivent succomber en premier ?"
 
"l’homme-famine, l’homme-insulte, l’homme-torture
on pouvait à n’importe quel moment le saisir le rouer
de coups, le tuer – parfaitement le tuer – sans avoir
de compte à rendre à personne sans avoir d’excuses à présenter à personne..."

Je ne peux pas changer grand-chose à ce monde du libre-arbitre. Mais je peux mettre un masque et me vacciner. C’est mon niveau. "Micro-niveau". Au moins aurai-je pu penser à un autre que moi, triompher ainsi de ce que je pense être mon jugement sur la fragilité d'autrui. 

Suis-je naïve ? Me suis-je faite avoir ? Raison ou tort ? Ces questions ont-elles, dans ce cadre du partage, de l’importance ?
Cet écrit est un témoignage. Un partage poétique aussi, d'un poème "Partir" de Césaire, offert à notre monde*.

 
Christina Goh

* Les phrases en italiques sont extraites du poème "Partir" extrait de Cahier d'un retour au pays natal de Aimé Césaire (1913-2008)

dimanche 1 août 2021

L'air de rien


C'est ce que tu veux ?
Mais l'air de rien
T'envoler ?

Peut-être

Une affection si
Soudaine... Ou sincère
Pour cette voltige ?

Peut-être

L'inconnu mortel sans fil
Ainsi pousses-tu le corps
Dans le triste abîme ?

Peut-être

Rage ou fixation pour 
Laisser au loin, l'oubli
L'infini du vide ?

Peut-être

Peut-être ?
Qu'est-ce donc ?
Ami, te moques-tu ?

Je n'ai pas d'ailes, vois-tu,
"Peut-être" me porte
Et planent mes peurs
En hauteur, ainsi sur terre
Je peux supporter mon enfer
Qui retient la douleur de ma chute

Ah...
Ami, veux tu savoir ce qu'est apprendre ?


Christina Goh

lundi 28 juin 2021

Le clairon et le sens (poème à étages)


La pièce du Puzzle se lamentait encore
Je connais ma valeur et ma couronne
Ma fougue brille de mille feux
Je suis soleil caché de leurs nuits 

Fort du détail de mes richesses
Bonne joueuse, je ne le serai plus
Que l'ensemble fasse sans mon service
Luit aujourd'hui ma lignée, reine, unique ! 


Cesse toute alliance ! Elle pensait vivre... Enfin
Mûe d'un désir d'éprouver ce monde ignorant
Foi de bout de Puzzle ! Elle serait seulette ressource...
Cyniques et drolatiques, aux abris, elle était le salut !

Gardien des nuits, guide du jour, le coq de loin, chantait
Pourtant. Crète en éveil. Pièce du Puzzle décida d'écouter
- Course vaine contre la montre, qui suit-il donc celui-là ?
- Farfelue, je m'inscris dans l'ensemble pour lui donner le sens.

Le sens... A comprendre...


Christina Goh
"Le clairon et le sens" est un poème à étages.

mardi 18 mai 2021

Nous

 
Refuse de disparaître
Essaie d'ouvrir les yeux
Je vois tes larmes. Chaudes
Et sueurs. J'ai eu peur

Mon cœur bat plus vite
J'ai lu tes erreurs. Oui
De plus en plus nombreuses
Tes oublis. Et ton air d'ailleurs

Dégringolade. Leurre ?
Non. L'appel au secours
J'entends, je te serre
Tendrement, encore plus fort

"Tombe et meurs !" Qui prie ?
Rumeurs...
Regarde moi, juste, une seconde
Nous sommes. Vois-tu ? Oh.... enfin !


Christina Goh

mardi 16 mars 2021

Sans réserve

 
J'aime et je t'aimerai, sans réserve, à perdre mon souffle
Je t'embrasserai encore et encore, à perdre haleine
T'accueillerai avec douceur dans mes bras, me blottirai contre toi
voluptueusement, et malgré tous les écueils ou les tristes envies
la maladie, la peur, le vide, la dégradation de nos mémoires
Les détresses des cyniques, même de nos propres indécisions
Je t'aimerai inlassablement, à dévoiler une essence cachée
l'effluve délicate, vertigineux, profond mystère du "toujours !"
La mort ? Mais de quoi parles-tu donc ?
As tu déjà vu de l'amour la tombe ?
As-tu déjà ressenti une brise, sublime baiser du vent sur ta peau ?
c'est la caresse subtile de tous les amours comme le mien
ceux qui parcourent depuis la nuit des temps les mondes
Ce doux alizé qui te pousse, te retient, t'entoure juste à temps
ou facétieuse bourrasque qui s'amuse de tes éclats ou de tes rires
C'est le persévérant amour
Oh oui, mon tendre, tendre amour, je souris, pleure, tant, avec toi
Je t'aime à perdre le souffle, libre soupir de gratitude dans le vent...
Après moi, ce souffle t'aimera encore. Toujours !


Christina Goh

dimanche 10 janvier 2021

Somnambulisme (après le chaos)


Toi ? Mais que fais tu ?
C'est que je croyais le connaître
J'essaie de comprendre
Je... 


Oui, il parlait de ma vie
Il était le seul, le seul et nous
Il parlait de nous... Ahh
Si fort pour moi. Ma tête...


Hors du temps... Avec lui...
Le repos. Sur ses mots.
Ma réalité... Il me berçait.
On n'était plus des bêtes

Il ne dit plus rien.
Où est-il ?
Si seul... Suis si seul...
Oublie-le, il t'a menti.

Trop mal... Peut-être... 
Mon Dieu le manque... Tellement mal...
Mal... Comme une bête qu'on saigne...

Ami, réveille toi... Doucement... Réveille toi...

Quoi ?
Tu as blessé et tu t'es blessé.
Tu marchais en dormant...


Christina Goh


*Le somnambulisme (du latin somnus et de ambulus signifiant « se promener en dormant »).